Montoir-de-Bretagne
A la croisée des voies fluviales, maritimes, terrestres et aériennes, Montoir-de-Bretagne forme aujourd’hui un véritable “hub” du transport de marchandises dans l’Ouest de la France. En près d’une cinquantaine d’années, le développement industrialo-portuaire de cette commune cernée par la Loire, le Brivet et le marais de Brière, en a fait une étape majeure du trafic maritime européen.
LA NAISSANCE D’UN PORT INDUSTRIEL
Au milieu des années 1970, dans un contexte de chocs pétroliers à répétition et d’instabilité géopolitique, l’Etat prend la décision de faciliter l’importation de gaz naturel en France. Porté par les élus locaux, le projet d’implanter un terminal méthanier sur la commune de Montoir-de-Bretagne est rapidement approuvé par le gouvernement de l’époque. Aux portes de l’estuaire et donc largement ouvert sur la façade maritime, le site occupe des terres artificielles gagnées sur des zones humides. Ce choix est aussi encouragé par une spécialisation précoce de la Basse-Loire dans les industries de l’énergie avec, dès 1917, la construction des premiers dépôts pétroliers de Donges, puis celle de l’usine à gaz de Roche-Maurice à Nantes transformant le gaz naturel de Lacq en gaz de ville jusqu’à sa fermeture en 1967.
En quelques années, un nouveau paysage industrialo-portuaire se dessine et transforme radicalement cette portion d’estuaire entre Donges et les chantiers navals de Penhoët à Saint-Nazaire. Le contraste est saisissant entre l’ancien paysage de vasière modelé par la digue de Bilho et le nouveau front portuaire rythmé par les appontements contre lesquels viennent accoster des navires toujours plus grands.
Un terminal, des terminaux
Le terminal méthanier de Montoir est mis en service au début des années 1980 afin de réceptionner le gaz naturel sous forme liquide et de l’introduire dans le réseau national de gaz. Avec ses trois cuves d'une capacité totale de 360 000 m3 il est aujourd’hui l’un des plus importants terminaux méthanier d’Europe. En plus du terminal méthanier, d’autres postes de chargement et déchargement complètent le dispositif logistique de la plateforme intermodale du port de Montoir-de-Bretagne : terminal roulier, terminal charbonnier, terminal à conteneurs, terminal agroalimentaire. Ainsi, c’est plus de 15 millions de tonnes de marchandises (vrac liquide, vrac solide, marchandises conditionnées) qui transitent chaque année par les terminaux de Montoir.
MONTOIR : UN TERRITOIRE MONDIALISÉ
Il fait chaud et le vent est tombé. Dans la lumière aveuglante flottent des odeurs étranges, indéfinissables. Tantôt doucereuses comme celles de fruits inconnus, tantôt âcres comme le soufre, tantôt épouvantables comme du poisson pourri. Holcim, Cargill, Sea Invest… Les géants du ciment, de l’agroalimentaire ou de la logistique trouvent naturellement leur place dans le panorama. Côté Loire, les quais sont surveillés. Impossible d’approcher le fleuve : « ISPS - Niveau de sûreté 1 », annoncent des panneaux fixés aux clôture. Ils ont fait leur apparition partout dans le monde après le 11 septembre 2001, sous l’impulsion des États-Unis qui ont souhaité relever et unifier les procédures de sûreté des installations portuaires. De la cheminée de l’usine Yara, où l’on fabrique des engrais et des produits azotés, s’échappe silencieusement une fumée épaisse et blanche qui monte haut dans le ciel avant de s’infléchir vers l’est.
AUX COMMANDES D'UN PORTIQUE CONTENEUR
Dernières consignes avant d’entrer dans la cabine de l’un des portiques conteneurs de Montoir : pas de bruit, pas de gestes brusques, pas de questions à Nicolas, le portiqueur qui est aux commandes du monstre d’acier, dont on doit respecter la concentration. Encore quelques marches aériennes et nous voilà dans le cockpit.
La cabine est entièrement vitrée, plancher compris. Nicolas est assis dans le vide, sur une épaisse plaque de plexiglas que l’on espère solidement rivetée. Il nous tourne le dos. Une manette dans chaque main – l’une pour le transfert de la charge dans les quatre directions, quai, fleuve, amont ou aval, et l’autre pour la hauteur –, il se positionne au-dessus d’un conteneur qu’un docker vient de placer sous le portique. Au bout des câbles, le spreader descend pour agripper la boîte qui s’envole dans les airs. Accrochée à des rails au-dessus de nos têtes, la cabine s’avance à la verticale du Laura Ann avec la charge dans ses filins. Bruit de métro. Freinage. À-coup. La tête constamment penchée vers le sol, Nicolas commence à descendre le conteneur avec précaution pour l’empiler sur un autre. En bas, sur le cargo, un docker s’apprête à l’aider pour la manœuvre. Sa voix grésille dans la radio. « Vas-y, descends ! Un peu à droite… amène un peu au large, amène un peu à terre, OK descends… doucement… T’es à trois mètres, deux mètres… encore… un mètre… OK c’est bon ! »